En France, environ 12 millions de personnes sont touchées par un handicap, soit près de 20% de la population, ce qui rend la question de l’accès équitable aux outils numériques cruciale. Dans cet article, nous nous concentrons sur les défis spécifiques rencontrés par les personnes en situation de handicap intellectuel, c’est-à-dire les personnes qui présentent une déficience intellectuelle et/ou qui sont autistes. Ces conditions exigent une attention particulière en raison des obstacles uniques qu’elles posent en termes d’utilisation des outils numériques et de compréhension des interfaces et de la culture du web.
Comprendre le Handicap Intellectuel : définitions et portée
Le terme « handicap » englobe toute limitation d’activité ou de participation à la vie en société due à une altération durable des fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques.
Parmi les différents types de handicap, la déficience intellectuelle (DI ou “handicap intellectuel”) se distingue par des limitations significatives du fonctionnement intellectuel et du comportement adaptatif. Touchant environ 1 à 2% de la population française, elle se manifeste par des difficultés dans divers domaines, notamment l’assimilation des codes sociaux, la mémoire, la résolution de problèmes et la compréhension des conséquences de ses actions. Cependant, il est important de savoir que chaque personne présentant une déficience intellectuelle est unique, avec des besoins et des capacités spécifiques.
Les troubles du spectre de l’autisme (TSA) représentent une diversité de symptômes variant d’un individu à l’autre. Le terme « spectre » reflète cette variété, incluant des troubles de la communication, des difficultés dans les interactions sociales, la présence d’intérêts restreints et stéréotypés et des troubles du traitement des informations sensorielles.
À la lumière de ces définitions et spécificités, quels enjeux se dessinent pour ces publics au sein d’une société de plus en plus numérisée ?
Des enjeux spécifiques d’inclusion numérique
Un accès matériel et sensorimoteur limité
- Du matériel informatique non pensé pour un public en situation de handicap : les souris, claviers, pavés tactiles et écrans tactiles, sont souvent conçus sans tenir compte des besoins spécifiques des personnes en situation de handicap. Cette absence de prise en compte rend l’utilisation de ces outils difficile voire impossible pour certaines personnes.
- Des interfaces non pensées pour un public en situation de handicap : dépourvues de fonctionnalités d’accessibilité dès leur conception, rendant ainsi l’accès aux applications et aux sites web difficile pour les personnes en situation de handicap intellectuel.
Cet environnement numérique normé met en lumière le principe selon lequel c’est aux personnes en situation de handicap de s’adapter et non l’inverse. On peut parler de validisme, principe qui établit que les personnes en situation de handicap, visible ou invisible, doivent être « réparées », « rééduquées », « transformées » pour mieux correspondre à la norme.
Ces défis exacerbent la précarité structurelle dans laquelle se trouvent les personnes en situation de handicap, qui sont 1,5 fois plus susceptibles d’être en situation de précarité que les personnes valides.
Une multiplicité de compétences mobilisées
De nombreux défis cognitifs se présentent lors de l’utilisation du numérique. Par exemple, la capacité à se concentrer, à planifier et à mémoriser est cruciale pour des tâches comme cliquer sur un bouton. Les troubles cognitifs peuvent aggraver ces difficultés, notamment lorsqu’il s’agit de traduire un mouvement physique en un déplacement virtuel sur un écran. Ce processus de « traduction » est cognitivement exigeant et peut rendre l’utilisation des dispositifs de pointage, tels que la souris, particulièrement complexe pour les personnes en situation de handicap intellectuel.
Compréhension des codes et conventions de la société numérique
La compréhension des normes et des comportements sociaux dans le monde numérique constitue un défi majeur pour les personnes en situation de handicap intellectuel. Elles peuvent avoir des difficultés à saisir les comportements appropriés, nécessitant des capacités cognitives telles que l’abstraction et le raisonnement, ce qui les rend plus vulnérables aux fraudes, aux arnaques et au harcèlement en ligne. Le manque d’accompagnement structuré et adapté aggrave cette vulnérabilité, accentuant ainsi les risques pour leur bien-être et leur sécurité en ligne.
Le modèle social du handicap et la nécessité d’une action collective
Le modèle social du handicap met en lumière le rôle crucial de la société dans l’inclusion des personnes en situation de handicap, soulignant que ce sont les barrières environnementales et sociales qui entravent leur pleine participation à la vie citoyenne. Cette approche invite à repenser nos structures et nos pratiques pour créer un environnement inclusif.
Pour agir dans cette direction, il est essentiel de rendre le web et ses contenus plus accessibles, en concevant des interfaces et des contenus adaptés à toustes les utilisateur-ices. De plus, des accompagnements numériques personnalisés sont nécessaires, à la fois pour diagnostiquer les besoins spécifiques des personnes en situation de handicap et pour les accompagner de manière adaptée, en tenant compte de leurs particularités cognitives et de leurs défis.
Emmaüs Connect et la Croix Rouge Française sont engagées dans des initiatives visant à soutenir l’inclusion numérique des personnes en situation de handicap, en développant des parcours pédagogiques adaptés et en apportant un accompagnement personnalisé. Par le biais de ses actions, notamment le soutien aux Relais Numériques, Emmaüs Connect œuvre activement pour relever ce défi crucial.
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